La Cité interdite Ⅲ - Gouverner le pays par les rites ⑴

Source: CCTV.com | 02-09-2010 10:03

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Si l’on compare les quatre portes de la Cité Interdite, la Porte de la Chine orientale est particulière. En effet, cette porte ne comprend que 8 faisceaux de décoration alors que les trois autres portes en ont 9.

Il y a 470 ans, cette différence qui semble infime choqua pourtant la cour impériale et la population. Le troisième mois lunaire de 1521, l'empereur Wuzong de la dynastie Ming mourut ne laissant ni fils ni frère comme héritier. L'impératrice douairière décida de placer sur le trône Zhu Houcong, Prince du Hubei. Mais alors qu’il était en chemin vers Beijing afin de monter sur le trône, il s'arrêta brusquement alors qu'il était sur le point d'atteindre la Porte de la Vertu Militaire.

Pourquoi Zhu Houcong s'était-il arrêté alors qu'il était sur le point de monter sur le trône ? Pourquoi était-il hesitant ?

Comme le veut la coutume, Zhu Houcong était supposé entrer dans la Cité interdite par la Porte de la Chine orientale, puis d'aller au Hall de la Gloire Littéraire où il serait formellement nommé prince héritier avant d'accéder au trône.

Mais comme la Porte de la Chine orientale ne comportait que 8 faisceaux de décoration arrondies, elle était considérée comme inférieure à la Porte du Midi, à la Porte de la Prouesse divine et à la Porte de la Chine occidentale. En outre, elle était située près du Hall de la Gloire Littéraire où vivait le prince héritier. L'empereur ne passait presque jamais par la Porte de la Chine orientale.

Zhu Houcong rejeta la demande du Ministre des Rites et souligna qu'il était venu pour monter sur le trône. Il ne pouvait donc pas entrer dans le palais comme un simple prince. L'impératrice douairière trouva un compromis rappelant aux fonctionnaires que le trône ne pouvait rester vacant trop longtemps et qu'ils devaient donc sortir de la Cité interdite et aller persuader Zhu Houcong d'entrer dans le palais.

Le 28e jour du 4e mois lunaire à midi, Zhu Houcong entra dans le Palais impérial par la Porte du grand Ming et emprunta la voie impériale pour monter sur le trône. Son nom de règne était Jiajing.

Au cours de cette polémique, les ministres avaient osé s'opposer à l’homme qui allait monter sur le trône. Zhu Houcong n’avait pourtant pas voulu changer d'avis, et ce même au risque de perdre la possibilité de monter sur le trône. Or les ministres avaient-ils réellement pris cette position simplement pour respecter le rituel ? Y avait-il un secret derrière ce rituel ? Si tel était le cas, pourquoi ?

En 1661, le 7e jour du premier mois lunaire de la 18e année du règne de Shunzhi, l'empereur alors âgé de 24 ans mourut. Dans son testament, il avait mentionné que Xuanye, son fils âgé de 8 ans , lui succèderait sur le trône.

Deux jours plus tard, Xuanye montait sur le trône au cours d'un grande cérémonie à la Cité interdite. Il n'y eut que 20 cérémonies similaires au cours des 5 derniers siècles.

Au moment où l'empereur Shunzhi était monté sur le trône, la dynastie Ming venait juste de disparaître. Beaucoup d'édifices dans la Cité interdite étaient encore en ruine: la cérémonie fut donc organisée à la Porte de l’Harmonie suprême et non dans le Hall du même nom comme le voulait la tradition. Lorsque Xuanye monta sur le trône, le pays était stable: il était possible d'organiser dans des conditions normales la cérémonie de couronnement. Mais les fonctionnaires du protocole devaient préparer toute la procédure entourant la cérémonie, la garde impériale d'honneur et désigner la place respective de tous ceux qui participaient à la cérémonie.

La description détaillée de telles cérémonies se trouve dans les archives des dynasties. En cas de changement de dynastie, une grande partie des procédures restait identique sauf pour les vêtements. Pour les fonctionnaires du protocole de la dynastie Qing, les « lois et règles de la dynastie Ming » étaient la meilleure référence. Aujourd'hui, si l’on veut recréer une cérémonie de couronnement comme à l'époque des Qing, on peut trouver matière dans les « lois et règles de la dynastie Qing ».

Avant de monter sur le trône, l'empereur en personne ou les fonctionnaires qu'il avait désignés se rendaient au Temple du Ciel, à l'Autel de la Terre, au Temple des Ancêtres impériaux, à l'Autel de la Terre et des Céréales pour offrir leurs respects au Ciel, à la Terre et aux ancêtres impériaux.

Le jour du couronnement, des gardes impériaux étaient en poste à chaque porte de la Cité interdite. Avant le lever du jour, les princes et les ministres revêtaient leurs habits de cour avant d'entrer dans la Cité interdite. Un char impérial, deux orchestres de musique impériale, des bannières, des drapeaux, des baldaquins et une garde d'honneur étaient répartis autour de la Porte de l’Harmonie suprême et du Hall de l’Harmonie suprême.

Toutes les portes du Hall de l’Harmonie suprême étaient ouvertes. Le Secrétaire du Grand Conseil et les fonctionnaires du Ministère des Rites entraient dans le hall et plaçaient l'édit impérial de couronnement, les messages de félicitations et le matériel pour écrire sur les tables. Le sceau impérial en jade était l'objet le plus spécial et il était placé sur une table située au sud du trône. C'est ainsi que Xuanye, alors âgé de 8 ans et habillé d'un habit de deuil blanc, se prosterna trois fois en touchant neuf fois le sol de la tête devant la tablette commémorative de son père. Puis il s'habilla en vêtement de cérémonie avant de se rendre au palais de l'impératrice douairière pour la saluer de façon solennelle. Le rideau de la porte centrale du Palais de la Pureté céleste était descendu, ce qui signifiait que la cérémonie de funérailles de l'empereur défunt était terminée.

A l'aube, l'empereur quitta la Porte de la Pureté céleste par la gauche pour se rendre dans le Hall de l'Harmonie centrale où il monta sur le trône. Les fonctionnaires responsables de la cérémonie devaient accueillir l'empereur de la manière la plus solennelle. Après cela, ils n’avaient plus à suivre le rituel et pouvaient retourner à leurs tâches.