Yan´an : l´espoir au-delà des épreuves(1)

Les grottes servaient non seulement de maisons mais aussi de salles de classe. Les conditions étaient très dures comme se souvient bien Shu Xiaoming.

A l’époque, la vie n’était vraiment pas facile. Nous avions tout juste assez de denrées pour manger trois repas par jour. Nous n’avions rien de plus.

Il y avait pourtant des moments et des activités qui rendaient les enfants heureux.

Tous les jours, à la tombée de la nuit, les gens éclairaient leurs maisons troglodytiques. Yan’an se trouve dans une région montagneuse, et la plupart des habitations se situaient à mi-hauteur des collines, certaines se trouvant plus hautes que d’autres. Au coucher du soleil, lorsque les gens arrêtaient le travail, ils commençaient à chanter des chansons folkloriques. On pouvait alors voir une multitude de points lumineux sur la colline et entendre le son des chants provenant des grottes. Je trouvais cela si romantique.

Il y a un souvenir bien particulier que Madame Shu n’oubliera jamais.

J’étais en train de courir lorsque j’ai heurté quelqu’un. J’ai relevé la tête et me suis alors retrouvée face à un homme très grand. J’étais déconcertée lorsque j’ai vu son visage, il m’était familier mais je ne le reconnaissais pas. A ce moment-là une personne se trouvant à côté de moi m’a chuchoté à l’oreille que c’était le Président Mao. Je l’ai immédiatement salué. Puis le Président Mao a fait signe de la main à une enfant au loin, qui a alors couru vers nous. C’était une petite fille de mon âge. Mao a sorti un chewing gum de la poche de la petite fille. Il l’a partagé en deux puis en a donné une moitié à la petite fille et une autre à moi. J’ai mâché ce chewing gum pendant très très longtemps !

Li Dali

Ancienne enfant réfugiée

A Yan’an, les dirigeants centraux et les enfants réfugiés étaient très proches. Ils s’occupaient vraiment de nous et se souciaient tout particulièrement des enfants qui avaient perdu leurs parents.

On ne se souciait pas de savoir si le père d’un tel était un capitaine ou pas. Nous étions une grande famille, nous avions tous le même père.

Huang Yixian

Ancien enfant réfugié

Les dirigeants centraux venaient souvent dans notre école, en particulier Zhou Enlai. Il nous rendait souvent visite. Zhu De adorait les enfants. Une fois, j’ai été photographié avec lui.

La communauté de Yan’an était une grande famille. Chacun s’assurait que les enfants étaient nourris, habillés et éduqués.

John Collings, L’Esprit de Yan’an.

Zhou Enlai

En dépit des dures conditions de vie à Yan’an, les enfants étaient très bien traités par les habitants, et cet esprit de bienveillance est à jamais gravé dans la mémoire collective.

Bien que la vie était très difficile à Yan’an, les jours que j’y ai passés sont très précieux à mes yeux, ils sont comme un joli rêve.

Yan Han est un spécialiste des beaux-arts, il est considéré comme l’un des plus grands sculpteurs sur bois chinois. C’est à Yan’an qu’a débuté sa longue carrière artistique.

Je suis parti de Xi’an à pied, en direction de Yan’an, et j’ai marché 11 jours.

Yan Han n’était pas seul pendant sa longue marche. Après que le Japon ait déclaré la guerre à la Chine en 1937, des milliers de personnes venant de toute la Chine se sont rués vers la base du Parti Communiste.

Marcher en direction de Yan’an était une opportunité pour les patriotes de se rassembler et de résister aux ravages causés par la guerre.

Le Parti Communiste grandissant de Yan’an attira alors l’attention et le soutien de tout le pays.

Yan Han, Vice-président

Association des sculpteurs sur bois de Chine

A cette époque, à Yan’an, tout le monde voulait se battre contre les agresseurs japonais. On pouvait voir beaucoup de jeunes révolutionnaires marchant fièrement en chantant.

Des écoles ont été ouvertes pour initier les jeunes entre autres à la politique, à l’entraînement militaire et à l’art.

L’endroit qui abritait l’école d’art de Yan’an, et où Monsieur Yan étudia la sculpture sur bois, avait sa propre et unique histoire.

L’église fût transformée en école d’art après que les communistes arrivèrent en ville. Elle fût baptisée « L’institut d’art Luxun » en référence au célèbre et très influent écrivain chinois du 20ème siècle.

La présence de cette église dans les montagnes du nord de la Chine est l’un des exemples illustrant la rencontre entre l’Orient et l’Occident.

L’école dispensait des cours de musique, de beaux-arts, de théâtre et de littérature, autant de voies permettant aux jeunes révolutionnaires d’exprimer leur exaltation.

Yan Han s’est consacré à la sculpture sur bois, non pas par vocation pour cet art mais plutôt par obligation.

Nous n’avions aucun matériel artistique à l’école. Comme il n’y avait pas de peinture, nous ne pouvions pas nous exercer à la peinture à l’huile. Nous n’avions pas non plus de pinceaux, et nous ne pouvions donc pas apprendre l’aquarelle chinoise. La seule option qui s’offrait à nous, c’était d’apprendre la sculpture sur bois. Autrefois je sculptais à l’aide de ces trois couteaux. J’ai eu beaucoup de couteaux à bois, mais ces trois-là sont les plus vieux, et je m’y suis attaché.

Etant donné que le pays était en guerre, trouver du matériel artistique s’est parfois avéré être une tâche très difficile.

A part le bois, nous n’avions aucun autre support. Nous abattions alors des poiriers afin de faire des blocs de bois pour pouvoir ensuite sculpter. Ici par exemple, l’épaisseur de cette planche montre qu’elle provient d’un vieil arbre. L’huile que nous utilisions pour imprimer était livrée de Xi’an. C’était vraiment des temps difficiles.

Nous vivions dans des conditions difficiles. En hiver, nos lits étaient simplement faits de planches en bois. Il faisait si froid que des glaçons se formaient sous notre couche. Notre enfant dormait entre ma femme et moi afin de rester au chaud. Malgré tout, nous n’avions pas l’impression que la vie était si dure. En fait, nous étions même plutôt heureux à cette époque.

Monsieur Yan a dû apprendre à déprécier son travail artistique lorsqu’il est arrivé à Yan’an. En effet et afin que les oeuvres artistiques soient à la portée de la classe ouvrière, l’école demanda à ses étudiants qu’ils aillent au contact des locaux.

Les étudiants vivaient avec les villageois, c’est pourquoi ils ont noué des liens très forts avec les familles. Nous formions une grande et joyeuse famille. Nous considérions les plus âgés comme nos propres grands-parents et les enfants étaient tous nos frères et soeurs. Nous aidions les villageois dans leurs tâches quotidiennes en allant chercher de l’eau, en nettoyant et en labourant les champs. Les locaux étaient tous si gentils avec nous. Ce sont ces expériences là qui m’ont poussé à sculpter une pièce que j’ai appelé « Nos soldats, notre famille. »

La décision de Yan Han d’étudier à l’école d’art marqua un grand tournant dans sa vie. Au bout de trois mois, il alla sur les champs de bataille pour décrire les scènes de guerre.

Ce sont ces travaux sur la guerre qui lui permirent de se distinguer des autres artistes.

Depuis, il est devenu un artiste de renommée mondiale et ses oeuvres sont présentées dans de nombreux livres et magasines étrangers, au Musée Guggenheim, ainsi qu’au siège des Nations Unies à New York.

Aujourd’hui et malgré son âge, il conserve encore de précieux souvenirs de son séjour à Yan’an.

Nous n’avions pas peur des difficultés car nous étions plein d’idéaux. La vie était dure mais nous étions fermement convaincus qu’un avenir merveilleux nous attendait.

Emission de CCTV-F

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